Chic j'ai 30 ans !
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Ne plus suivre les règles (et en créer de nouvelles)

Inventer ses propres règles à 30 ans : le début de l'indépendance

Si le fait d’être adulte n’est pas une question d’âge, alors à quoi cela tient-il ? Dernièrement, j’ai découvert un nouvel élément de définition de ce concept lorsque je me suis rendue compte que, face à un problème, j’avais appris avec les années à ne plus systématiquement chercher les réponses ailleurs… et à inventer mes propres réponses. Alors qu’auparavant je me tournais vers les adultes pour savoir si « j’avais bien répondu », désormais, on se tourne vers moi pour cela. Et je réponds, sans filet.

Les règles tacites

Vous êtes-vous déjà posé la question de savoir qui fixait les règles ? Bon, pour certaines, comme les lois, c’est connu. Mais pour le reste ? Qui les fait et comment ? Car ce dont je veux parler ici, ce ne sont pas les règlements mais plutôt les lois tacites, le « c’est comme ça que ça marche, que les choses fonctionnent ».

Et d’ailleurs, qui a dit qu’il ne fallait pas commencer le repas par le dessert ?

Enfant : Apprendre les règles

Lorsque l’on est enfant, on découvre les règles du jeu. Ou plutôt, de la vie. On découvre ses propres limites physiques et en même temps, les limites que les autres nous imposent. On apprend qu’il ne faut pas parler fort à la bibliothèque, monter les escaliers roulants en à contre-sens ou dire du mal des gens dans leur dos. Entre autres.

Adolescent : Suivre les règles

Une fois les règles sues, il faut les intégrer et les appliquer. Nous sommes formés à cela, entraînés. Cela s’appelle l’éducation. On n’est pas toujours d’accord avec ce que l’on nous demande de faire, mais « tu feras ce que tu voudras quand tu seras chez toi / quand tu seras grand(e) ». Vivement.

Adulte : Inventer de nouvelles règles

Arrivé à l’âge adulte, le rapport aux règles change.

Oublier les règles

Il peut arriver que l’on s’accorde des latitudes avec certaines d’entre elles, tout simplement parce que l’on est désormais capable d’évaluer l’importance ou non de les respecter. Attention, ce que j’écris ici n’est pas une ode à l’anarchisme, ni une apologie de la désobéissance. Je suis la première à reconnaître qu’il faut des règles dans la société, par exemple, je ne supporte pas les incivilités : les gens qui prennent des photos avec flash au musée ou qui jettent leurs mégots sur la plage me mettent hors de moi. Mais parfois, on peut se permettre de faire un pas de côté si cela ne nuit à rien ni à personne. Oui, il m’est déjà arrivé d’aller faire pipi au McDo sans rien acheter, mais c’était pour pas pisser sur la pelouse du parc (parce que ça, c’est vraiment pas bien).

Transmettre les règles

Avec l’âge adulte arrive aussi le temps de la transmission des règles. Nous les avons si parfaitement intégrées que l’on est capable de les apprendre à d’autres. Inutile d’être parent pour cela : votre simple statut d’adulte fait désormais de vous une personne référente pour les plus jeunes. C’est naturellement que l’on viendra vous voir pour vous demander comment on fait pour lire un disque vinyle CD, tricoter des chaussettes ou monter un meuble Ikéa.

L’émancipation : quand l’expérience devient légitimité

Et enfin, il y a le dernier aspect, que j’ai remarqué dernièrement. J’ai remarqué que l’on venait désormais vers moi avec des questions pointues sur des sujets précis. Et à chaque fois je donnais une réponse hésitante, en cherchant des infos pour vérifier ma réponse par trois fois, en flippant de me tromper. Alors que la réponse, je la connaissais, je le savais au fond de moi. J’ai fini par comprendre que si les gens venaient me poser ces questions, c’était parce qu’avec le temps et l’expérience, j’étais devenue une experte de ces sujets. Je m’étais bâti une légitimité.
La prise de conscience de cette légitimité a changé beaucoup de choses. La légitimité, c’est la confiance que mes autres placent en vous. Alors, autant vous faire confiance vous-même. Je me suis rendue compte que je n’avais plus à vérifier par trois fois les infos, tout simplement parce que l’info, c’était moi. J’ai compris que je pouvais non seulement m’affranchir des multiples vérifications d’infos données par d’autres, mais je pouvais aussi m’affranchir de leurs réponses et créer ma propre solution aux problèmes posés.

Inventer ses propres réponses

Quand j’ai lancé ce blog avec pour sujet l’âge de trente ans, je n’étais pas du tout spécialiste de la chose. J’étais juste spécialiste de moi, de la manière dont je vivais ma propre trentaine. En 6 ans, je me suis passionnée pour ce sujet, nourrie de mes échanges avec vous, mes lecteurs. J’ai lu et bien sûr écrit sur le sujet. La première fois qu’on m’a interviewée comme « experte » sur le sujet de la trentaine, j’ai eu un profond sentiment d’imposture. Maintenant je vois que j’ai effectivement des réponses. L’expérience m’a permis d’inventer mes propres réponses aux questions sur ce sujet et c’est justement ce qui fait de moi une experte. Idem lorsque j’anime des formations en communication auprès d’adultes. Je me suis rendue compte que je pouvais désormais inventer de nouvelles réponses à partir de mes connaissances, de mon expérience.

Pourtant, je n’ai pas l’âme d’une donneuse de leçon. D’ailleurs, quand on me demande comment il faut faire ci ou ça, ma première réaction est encore la panique. Et si je me trompais ? Où puis-je vérifier ? Qui peut valider ? Et puis je me rappelle ce mot : légitimité. Et je réponds. Être dans la posture du sachant est agréable. C’est même exaltant. Mais je marche sur des oeufs.

Et si on apprenait à se faire confiance ?

Aujourd’hui je repense à certains désaccords que j’ai pu avoir auparavant avec des détenteurs de règles et de savoirs. Des profs, par exemple. Je songe à ce prof de philo en hypokhâgne qui avait une manière de raisonner opposée à la mienne. Avais-je vraiment tort, avait-il vraiment raison ? Y a-t-il vraiment des « règles » en philosophie : des choses que l’on peut écrire, une manière de raisonner qui serait meilleure qu’une autre ? Vous avez 4 heures.

Alors pour conclure je dirais cela : si vous pensez avoir acquis assez d’expérience et de connaissances dans un domaine : faites-vous confiance pour mettre en application, transmettre et inventer. La prudence, c’est bien, mais être incapable d’avancer sans tout faire valider et re-checker par vos parents, votre supérieur, votre banquier… c’est vous priver d’une autonomie méritée.

Attention cependant à bien identifier au préalable votre petit pré carré d’expertise. À moins que vous soyez Prix Nobel dans plusieurs domaines, il ne devrait pas être très grand. Il n’y a rien de pire que ceux qui n’y connaissent rien et qui essaient de créer de nouvelles règles quand même. Je crois que l’une des plus grandes désillusions de la fin de mon enfance a été de réaliser qu’en réalité, certains adultes ne savaient pas plus ce qu’ils faisaient que les enfants. Mayday, mayday… y a-t-il un pilote dans l’avion ?

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